La place de grève au XVIIIe siècle
Me voici en grève en ce jeudi 17 septembre. Cela ne m'était pas arrivé depuis 2010... L'occasion d'une explication.
Tout d'abord avec mes élèves de section internationale britannique qui voulaient savoir hier si je serai en grève en ce jour, cela m'a permis de faire un petit rappel historique. En effet, en anglais, le fait de cesser de travailler pour protester se dit "to be on strike" alors qu'on dit "être en grève" en français. J'ai ainsi pu évoquer l'origine de l'expression qui a un rapport avec un lieu 4e arrondissement : les ouvriers parisiens avaient l'habitude de se réunir place de grève, l'actuelle place de l'Hôtel de Ville, notamment pour montrer leur mécontentent. Quand ils arrêtaient le travail, ils étaient donc "en grève". Rappelons qu'une grève est une rivage en pente douce où il est possible de décharger les marchandises. Il est intéressant qu'à Londres, on trouve aussi un quartier appelé le Strand (à la jonction entre la City et Westminster) qui désigne aussi une rive sablonneuse en pente douce. Voilà donc pour le point d'explication que j'ai pu faire à mes élèves.
Pour ce qui concerne les lecteurs de l'Indépendant du 4e, cela me donne aussi l'occasion de dire pourquoi je suis inquiet. En effet, j'avais écrit un article en juin dernier pour expliquer pourquoi je n'avais pas participé au denier mouvement de grève malgré de grandes réserves concernant la réforme des Collèges (voir mon article du 11 juin 2015).
Or, depuis mon inquiétude n'a fait que grandir à propos de ce que l'on a pu observer à propos de la mise en place de l'enseignement moral et civique. A cette occasion, par un décret de fin juin 2015, on a mis à vas un enseignement qui avait au moins le mérite d'avoir un cadre clair, l'éducation civique pour le remplacer par cette nouvelle discipline. On en a profité pour publier un nouveau programme qui pour le collège se répartir sur deux grands niveaux (cycle 3 : CM1, CM2, 6e et cycle 4 : 5e, 4e, 3e). Tout cela impliquant donc une coordination des équipes et des programmes en un claquement de doigts, comme si préparer des cours se faisaient par la seule inspiration du Saint-Esprit. Le tout bien sûr sans que soit publié de manuel collant parfaitement à un programme décidé quelques jours avant la sortie (de toute façon les collèges n'ont pas les budgets pour renouveler en une seule fois tous les niveaux)... ce qui fait qu'il faut continuer à utiliser les anciens livres d'éducation civique !
Comme il a fallu se rendre à l'évidence que pour le brevet des collèges, l'idée de faire un programme de 5e, 4e et 3e sans préciser ce qui serait évaluer lors de ce dernier niveau, le ministère a publié APRÈS la rentrée un additif avec le programme relatif à la seule classe de 3e. Le tout avec un emballage très light. On passe de 2 pages très précises concernant l'éducation civique telle qu'on l'enseignait l'an dernier en 3e à une vague liste de thèmes qui fait une demi-pages.
Cela ne me paraît pas raisonnable. Je fais partie des enseignants qui considèrent -et je suis loin d'être le seul- que la progression annuelle se prépare en amont dès les grandes vacances et qu'il est regrettable de travailler sur des programmes qui semblent faits au derniers moments à la va-vite. Pour que les programmes restent vraiment un socle commun il faut qu'ils aient un réel rôle normatif autrement tout peut être permis ce qui n'est pas forcément un gage de qualité pour ce qui sera enseigné.
Ce qui est donc alarmant c'est que la réforme des collèges préparées pour l'an prochain dans toutes les matières repose donc sur une vision très approximative de ce qu'est le travail d'enseignant au collège. Le collège a cruellement besoin d'une réforme mais pas celle-là et pas comme ça !
Tel est donc le sens de mon arrêt de travail aujourd'hui. Je ne sais pas si cela servira à je tenais à faire part de mon inquiétude.
Voici à cette occasion le communiqué publié par le SNES, un des principaux syndicats d'enseignants :
Cette réforme centrée sur l’autonomie des établissements et une interdisciplinarité forcée installée en diminuant les horaires des disciplines ne peut qu’augmenter la charge de travail des personnels et multiplier les réunions dans les établissements, sans permettre aux élèves de mieux réussir. Elle mènera le collège vers les mêmes difficultés que les lycées : complexification de l’organisation de l’établissement, renforcement des inégalités entre les élèves, les personnels et les établissements. C’est d’ailleurs pourquoi le ministère retarde de mois en mois le bilan de la réforme des lycées.
Les sondages de l’été l’ont montré, ni les personnels ni les parents ne veulent de cette réforme. La ministre s’entêtera-t-elle dans de telles conditions à vouloir imposer une réforme majoritairement rejetée, en particulier par ceux-là même qui travaillent quotidiennement avec les élèves et ont à cœur de les voir réussir ?
Ceux qui se sentent concernés peuvent signer la pétition suivante : lien.
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