L'incident ne se produit pas pour la 1ère fois lors d'une séance d'une Conseil d'arrondissement du 4e. Lundi 30 janvier, un membre du public a été réprimandé par une élue (cette fois-ci Mme Zarka, maire adjointe PCF) car il enregistrait au moyen de son téléphone portable les propos de la maire du 4e. De même, il y a quelques années, lors d'une séance du Conseil d'arrondissement, une personne du public avait été très vertement tancée par la maire du 4e car elle prenait des photos des conseillers d'arrondissement. A chaque fois, les élus invoquent le droit à l'image.
Je tiens donc à rappeler une règle. Une loi qui n'est pas toute récente (elle date du 24 février 1996) a permis l'enregistrement vidéo des conseils municipaux. L'article L2121-18 du Code des collectivités territoriales prévoit que les séances des conseils d'arrondissement "peuvent être retransmises par les moyens de communication audiovisuelle" (voir le site Légifrance).
Or, comme il me reste quelques notions de Droit public (telle était ma spécialisation à Sce Po Paris), je sais que le droit administratif reste (malgré la codification) un droit "essentiellement jurisprudentiel". Ainsi, la jurisprudence a précisé que les administrés présents dans la salle avaient aussi la faculté d'enregistrer les débats (Cour administrative d'appel de Bordeaux, 24 mars 2003, requête n° 99BX01857). Le maire peut interdire l'enregistrement des débats uniquement si cela est justifié par des "circonstances particulières". (Voir le site de l'Association des maires de Charente Maritime).
Nul n'est sensé ignorer la loi... même les élus !
Un avocat des élus auprès des juridictions administratives pourrait invoquer les prétextes suivants pour justifier l'interdiction d'enregistrement vidéo lors du Conseil d'arrondissement du 30 janvier dernier :
1°) Les conseils d'arrondissement ne sont pas formellement des conseils municipaux (mais ce serait vraiment tiré par les cheveux).
2°) L'incident du 30 janvier dernier s'est déroulé pendant la séance des questions du public et donc formellement le conseil d'arrondissement était clos (cela est beaucoup plus défendable).
3°) L'enregistrement s'est fait clandestinement. Son auteur a cessé immédiatement quand il a été repéré. (On aurait dit un de mes élèves surpris en train de faire une bêtise). Cet argument est certainement encore plus déterminant.
4°) L'incident concernait un dossier très sensible : l'ouverture de la boîte rue Pierre Au Lard et la maire pouvait prétexter qu'il s'agissait d'un dossier explosif ce qui semble être bien le cas ... mais là je ne suis pas sûr que le juge administratif comprenne !
L'enregistrement vidéo des conseils d'arrondissement faisait d'ailleurs partie des engagements de Madame Bertinotti dans son programme municipal de 2008. Je l'ai interrogé il y a quelques mois à ce sujet lors d'un Conseil d'arrondissement et elle a admis que, finalement, cela ne lui semblait pas très opportun pour la qualité des débats... Elle ne semble pas vouloir donner une tribune à son opposante la plus coriace, son adjointe verte, Corine Faugeron (mais ça c'est une autre histoire).
Merci Emmanuel pour ce très interressant rappel sur la publicité légale des conseil d'arrondissement.
Leur enregistrement est un bon projet,e dommage qu'il soit différé.Très utile pour celles et ceux qui finissent de travailler tard, pour n'exclure personne de la démocratie.
Ceci ne peut se faire que dans la transparence, les enregistrements clandestins ne sont pas respectueux.
Amitiés
Laurent Petit
Rédigé par : Laurent Petit | dimanche 04 mars 2012 à 10h08