La flamme olympique doit passer à Paris lundi 7 avril. Elle fera un passage dans le 4e arrondissement puisqu'un arrêt est prévu place de l'Hôtel de ville. En tant que Parisien, je trouve cela très discutable.
La République Populaire de Chine est la plus grande prison du monde. Elle a réussir à lier le capitalisme avec un système politique proche du totalitarisme. Pour mémoire, plusieurs milliers de personnes sont condamnées à mort chaque année. Des millions de Chinois sont dans des camps de travail (le "Laogaï") qui rappellent beaucoup les Goulags de l'URSS. Le Tibet et le Xinjiang (la région du Nord Ouest de la chine majoritairement turcophone) sont soumis à un régime de terreur permanente pour faire taire les mouvements indépendantistes ou autonomistes. Rappelons qu'encore la semaine dernière, un militant des droits de l'Homme, Hu Jia a été condamné à 3 ans 1/2 de prison pour "incitation à la subversion".
Je suis consterné par l'attitude des dirigeants de tous bords. Rappelons que pendant la campagne présidentielle Ségolène Royal s'était laissée à vanter la rapidité de la Justice chinoise (elle parlait paraît-il de la justice commerciale). Il s'agissait vraiment d'une désolante "bravitude". Quant à Nicolas Sarkozy, j'avais cru comprendre dans plusieurs de ses discours qu'il serait pour le monde entier le président des droits de l'Homme. J'ai même assisté à un meeting où André Glucksmann était présent et où des engagements avaient été pris pour dénoncer les massacres commis en Tchétchénie par Vladimir Poutine. On peut comprendre que la raison d'Etat et les intérêts commerciaux fassent réfléchir à deux fois nos dirigeants avant de prendre des positions fortes contre la Chine et la Russie. Mais, finalement, il s'agit en fait de laisser une partie de l'humanité subir la peur pour pouvoir, nous, continuer à vivre tranquillement. Alain Juppé sur son blog a raison d'ironiser avec l'idée de demander aux dirigeants chinois de "tuer avec retenue" (tout en ayant l'honnêteté de s'interroger sur ce qu'il aurait fait s'il avait été au pouvoir).
Certaines leçons de l'histoire doivent faire réfléchir : les accords de Munich de 1938 nous rappellent qu'à trop pactiser avec des dictateurs et à céder sur le plan de l'honneur on finit par tout perdre. Justement, deux ans avant ces accords, un débat avait eu lieu sur la participation aux J.O. de Berlin de 1936. Lors de la cérémonie d'ouverture, la délégation française se laissa aller à saluer Hitler avec le bras droit levé -un geste de bonne volonté envers leur hôte !! -. Jusqu'où faut-il aller au nom de l'olympisme ?
En ce qui concerne les J.O. de Pékin, l'erreur initiale est due au Comité International Olympique quand il a fait le choix de cette ville. Je comprends que les sportifs souhaitent participer aux épreuves car les J.O. sont souvent le rêve de toute une vie et il ne serait pas normal qu'ils paient pour les autres. C'est donc dans tous les gestes symboliques qu'il faut montrer une réaction.
Je ne suis pas sûr que le fait d'ajouter un badge ou un bandeau "Pour un monde meilleur" change grand chose. Ironiquement, cela rappelle même le titre du livre de Huxley "Le meilleur des mondes" (Brave New World) qui justement dénonçait en 1932 les risques du tototalitarisme. Ce qui aurait un sens, c'est que chaque athlète parraine un prisonnier politique chinois et porte la mention (en français et en chinois) : "Libérez untel ou unetelle".
Le maire de Paris a annoncé qu'il mettrait une banderole sur l'Hôtel de ville pour rappeler que tous les pays doivent respecter les droits de l'Homme. C'est très insuffisant. La ville de Paris aurait vraiment eu un geste fort si elle avait refusé de participer à une mascarade qui va permettre aux autorités chinoises de montrer que la Chine a partout dans le monde, même dans la capitale de la "patrie des droits de l'Homme", une bonne image.
Je soutiens donc l'action de Reporters Sans Frontières qui dénonce la participation de la ville de Paris à cette célébration.
Bravo ! Super article !!!
Rédigé par : Marc | mardi 08 avril 2008 à 14h11