Heureusement que je me rase le matin avec un rasoir électrique car autrement hier matin, en écoutant la radio, j'aurais pu gravement me couper...
En effet, alors que j'étais tranquillement en train d'écouter la radio, j'ai entendu un petit reportage sur France Info. On y annonçait que la veille Ségolène Royal s'était livrée à sa première réaction politique (sic) depuis les élections européennes et que si elle ne s'était pas montrée trop méchante pour Martine Aubry elle avait néanmoins rappelé que par rapport à son score au 1er tour de la présidentielle, le PS avait perdu 6 millions de voix.
Ce qui m'a retourné c'est que le reportage a précisé que cette déclaration avait eu lieu "dans une petite salle du 4e arrondissement". Je suis fort étonné !
Il se trouve que j'étais la veille dans cette "petite salle"...
"Désirs d'avenir", le think tank ségoléniste, organisait une "université populaire" sur le thème suivant "Quel nouveau modèle de développement économique et social pour l'après-crise ?" Un de mes anciens professeurs favoris de Science po, Jean-Paul FITOUSSI, était annoncé et je ne voulais pas rater une de ses interventions aussi près de mon domicile. J'ai eu beaucoup de chance puisque, arrivé vers 19h10, j'ai pu entendre l'intervention d'un syndicaliste CFDT de la sidérurgie qui a eu des propos très intelligents. Puis, Jean-Paul Fitoussi a pris la parole... à distance car si j'ai bien compris il était à Rome où il exerce aujourd'hui. M. Fitoussi s'est livré à une analyse très intéressante de la crise actuelle. Il a affirmé qu'à ses yeux elle s'expliquait par l'accroissement des écarts de revenus depuis une vingtaine d'années dans le monde. Son intervention, certes engagée, a été -comme toujours- à la fois technique, précise et lumineuse.
Je ne suis pas resté plus longtemps car après une longue journée de travail, en raison de la station debout et de la chaleur, je ne me sentais plus très frais pour suivre les interventions suivantes. Ces universités populaires s'adressent à un prolétariat qui n'est pas trop harassé par sa journée de labeur !
J'ai raté les discours d'introduction et de conclusion de Mme Royal, mais elle semble s'être livrée, d'après France Info, à un discours très politique. Tout ce que j'ai pu voir c'est que l'ancienne candidate à la présidence de la République jouait les animatrices.
Ce qui me surprend le plus c'est que France Info a évoqué une "petite salle du 4e arrondissement". Il s'agissait de la vaste salle des fêtes de la mairie du 4e arrondissement qui était pleine à craquer (comme en atteste la photo en tête d'article).
Pour mémoire la salle des fêtes de la mairie du 4e, décorée en 1883 par Léon Commerre, est une des plus vastes parmi celles des 20 arrondissements de Paris ! Elle fait toute la longueur comprise entre la rue de Rivoli et la rue François Miron soit une cinquantaine de mètres de long.
La mairie du 4e semble donc vouée à devenir un lieu de meeting pour Ségolène Royal. Rappelons que cela s'était déjà produit il y a quelques semaines (voir mon article du 2 mai 2009). Il est vrai que la maire de l'arrondissement, Mme Bertinotti, est une des proches de Mme Royal. A propos du déplacement du buste de De Gaulle, la maire nous avait pourtant expliqué, il y a quelques mois, que d'après elle une mairie était un lieu neutre... (article du 24 mars 2009).
Faut-il penser que la maire du 4e arrondissement est sectaire ? Un commentaire laissé sur un blog du 4e qui évoque le fait que, lorsqu'elle a fait la tournée de certains bureaux de vote le 7 juin dernier, elle n'a serré la main que des seuls assesseurs socialistes, pourrait le suggérer ! Moi qui croyais que la tolérance était une valeur de gauche, j'ai du me tromper.
Cher Emmanuel,
Je trouve certains de tes commentaires parfaitement déplacés. Ainsi : "Ces universités populaires s'adressent à un prolétariat qui n'est pas trop harassé par sa journée de labeur !" Nous ne sommes plus au temps de la lutte des classes, et il n'est pas bon je crois d'utiliser des termes faisant écho à des passés douloureux.
Je crois bien au contraire que ces Universités Populaires et Participatives des Connaissances (UPPC) sont un merveilleux exemple de la mission que tout politique devrait faire sienne : échanger les savoirs, débattre sur des thèmes essentiels.
Quand à la polémique que tu sembles toujours vouloir alimenter sur le fait d'avoir organisé par deux fois ces Universités en Mairie, je te rappelle une nouvelle fois que Désirs d'Avenir, qui organise ces UPPC, est une association dont l'objet est le suivant : "réfléchir à la situation sociale, politique et économique en France, en Europe et dans le Monde et de contribuer, notamment par ses propositions, à son amélioration, dans un esprit de justice sociale." (source : www.desirsdavenir.org). Une telle action n'aurait donc pas sa place dans une Mairie ? Je pense au contraire que c'est une formidable opportunité que de réunir dans un lieu ouvert à tous les habitants du 4e des économistes comme Jacques Attali, Philippe Aghion, Yann Algan, Jean Paul Fitoussi, mais également des syndicalistes (celui que tu évoques s'appelle Edouard Martin, syndicaliste CFDT, ancien délégué syndical d’Arcelor Mittal à Gandrange)...
Donc Bravo à Ségolène Royal d'avoir l'audace d'organiser et d'ouvrir des débats de cette qualité, et merci à Dominique Bertinotti d'avoir accepté d'héberger une seconde fois cette UPPC dans un lieu ouvert à tous les habitants du 4e. C'est une chance, je crois, pour notre quartier !
J'en profite pour t'inviter aux prochaines UPPC, en particulier celle qui aura lieu à Poitiers les 1er, 2 et 3 octobre avec le brillant Edgar Morin, sur le thème suivant : au delà du développement, les sept défis pour une politique de civilisation. Encore des rencontres qui s'annoncent passionnantes !
Tu trouveras tous les détails sur le site de désirs d'avenir : www.desirsdavenir.org
Rédigé par : Fabien | lundi 22 juin 2009 à 12h53
Cher Fabien, merci pour ce long commentaire argumenté et au ton "positif". Il montre ton opinion et donc comme je l'ai toujours fait jusqu'ici (pour les écrits qui respectent les limites de la liberté d'expression) je le publie. Je m'étonnais que cet article n'ait suscité aucune remarque alors que la fréquentation du blog est toujours à la hausse.
Plusieurs réponses qui je l'espère ne blesseront personne (mais sur ce blog je livre librement mes points de vue) :
1°) le labeur douloureux de certaines catégories n'est pas fini : je pense par exemple aux caissières de ma supérette. Après une journée de travail je ne suis pas sûr qu'elles soient beaucoup plus en forme que certaines professions au XIXe siècle. Le "peuple" continue à avoir un existence parfois misérable. J'ai enseigné pendant 5 ans dans des collèges difficiles. Là j'ai rencontré des catégories populaires... J'en rencontre encore aujourd'hui dans un collège plus aisé. J'ai à lesprit notamment une mère Tchétchène dont j'ai suivi le dossier cette année. Elle se tue à la tâche en faisant des ménages dans des hôtels parisiens. Je ne suis pas sûr de voir le même public lors des "Universités populaires et participatives". Il est vrai que le mot "populaire" est utilisé à toutes les sauces. Il figure même dans les initiales d'un important parti politique français...
2°) en ce qui concerne la CFDT, je connais bien, j'y ai été adhérent pendant de nombreuses années. J'ai même été candidat sur une liste pour des élections professionnelles (CAPA). La CFDT un syndicat que je continue à estimer car il est courageux sur de nombreux dossiers. Que l'on se rappelle de Nicole Notat et de son audace dans les années 1990 à une époque où certains grands partis de gauche donnaient dans une démagogie que je ne trouve pas constructive.
3°) Ce n'est pas moi qui évoque le caractère politique des universités populaires de Désirs d'avenir. A lire par exemple, Le Monde daté du 17 juin 2009 : "Commentant pour la 1ère fois l'échec des élections européennes, l'ancienne candidate socialiste à l'élection présidentielle, qui s'exprimait, lundi 15 juin, devant quelques 600 fidèles réunis à la mairie du 4e arrondissement de Paris, n'a pas voulu enfoncer le clou de la défaite [...]" (article signé Jean-Michel NORMAND). Je ne fais que citer ! Merci à ce journaliste de me classer parmi les "600 fidèles" !
4°) J'ai énormément de respect pour Edgar MORIN qui est certainement le plus grand intellectuel français vivant. Malheureusement, je pense que sauf modification des calendriers scolaires, les 1et et 2 octobre je travaille...
Je ne pourrai donc pas entendre de lumineuses leçons sur la "pensée complexe".
5°) Sur le fond, Edgar MORIN est un apôtre de la tolérance car il montre que les comportements sectaires sont voués à l'échec. Je continue à ne pas comprendre comment une maire d'arrondissement peut dans certains bureaux de vote se permettre de ne serrer la main que des seuls assesseurs socialistes ! Quelle marque de mépris pour ceux qui ne pensent pas comme elle !
6°) Ce qui me reste en travers de la gorge est l'argument utilisé pour expliquer la mise au placard de la statue du général de Gaulle en 2001 : l'idée qu'une mairie est un lieu neutre et que la politique n'y a pas sa place n'est pas valide. Je vais prendre le risque de faire "vieux con" mais je considère que ce comportement à l'égard de l'ancien chef de la France Libre est incompréhensible. Je persiste à penser que le buste du général de Gaulle, dans un arrondissement où il a prononcé en 1944 la fameuse phrase "Paris outragé, Paris martyrisé, mais Paris libéré", a droit à une place d'honneur.
Rédigé par : Réponse de L'Indépendant du 4e | lundi 22 juin 2009 à 13h50
Je ne répondrai pas sur les points 5 et 6, ne connaissant pas le contexte du point 6, et n'ayant pas constaté le point 5 dans le bureau de vote que j'ai présidé (bureau n°14, Couperin).
Sur le reste,
Je suis totalement d'accord, tout le monde ne pouvait pas se rendre aux Universités un soir à 19h, et il est vrai que ce peut être difficile après une journée de travail harassante, comme en connaissent beaucoup. C'est pourquoi, également, Désirs d'Avenir prolonge les débats en publiant l'intégralité des vidéos, et en ouvrant un espace de partage sur son site pour chaque Université. Le terme "populaire" prend ici, c'est mon opinion, tout son sens.
Je suis également d'accord avec toi sur la CFDT, c'est un syndicat que je soutiens à titre personnel, même si je n'en fais pas partie, pour ses positions audacieuses et son sens du compromis. A ce titre je suis particulièrement enthousiaste à l'idée d'une plus grande collaboration avec le Parti Socialiste, de même que tous les syndicats, comme le prône depuis le départ Ségolène Royal lorsqu'elle défend le syndicalisme de masse.
Sur le caractère politique de l'UPPC, effectivement Désirs d'Avenir a une vocation politique, mais pas politicienne, et je fais une différence. Aussi, si tu as pu écouter la retransmission du discours rapide de Ségolène Royal, elle a tenu à insister sur le fait qu'elle ne souhaitait pas s'appesantir sur les dernières échéances, mais elle l'a fait en une phrase seulement, celle que tu cites. Sur près de 4h de débats, je pense que c'est raisonnable.
Sur les "fidèles", je n'étais pas à la mairie pour ces débats, mais je ne crois pas me tromper en disant que le 4e était largement représenté, loin d'une monochromie partisane, en témoigne par exemple ta présence.
Enfin, pour les UPPC avec Edgar Morin, dont je partage avec toi l'admiration, si tu ne peux être présent et si ça t'intéresse, tu pourras contribuer aux réflexions menées, comme toujours sur le site de Désirs d'Avenir ;)
Rédigé par : Fabien | lundi 22 juin 2009 à 15h10