Lors de la fin du Conseil d'Arrondissement du 20 mai 2008, après un moment épique sur lequel je reviendrai dans un prochain article -la session des questions du public-, Corinne Faugeron, adjointe verte depuis les dernières élections a annoncé la tenue d'une "votation citoyenne" organisée le mecredi 21 mai en début de soirée place Baudoyer, vendredi au même horaire sur le terre plein Saint-Paul et à nouveau samedi matin place Baudoyer. Le thème de cette "votation" portait sur le droit de vote aux élections locales pour les étrangers non ressortissants de l'Union Européenne. Je n'ai pas participé à ce pseudo moment démocratique car je n'étais justement parti de Paris du 21 au 24 mai mais la publication des résultats appellent plusieurs commentaires.
Tout d'abord à la télévision, lorsque j'ai vu les images de Bertrand Delanoë participant à ce "vote", j'ai été particulièrement choqué par l'oubli d'un geste important à mes yeux. Les votants devaient mettre dans l'urne un bulletin où la mention "Oui" ou "Non" était visible. En tant que professeur d'éducation civique, je trouve dommageable que l'on fasse ainsi oublier un rituel essentiel de la démocratie : le secret du vote. Cette désinvolture pourrait laisser penser que la question n'était pas si importante que cela.
Or, tel n'est pas le cas. Le droit de vote des étrangers -non citoyens européens- soulève un vrai débat. Pour ma part, je suis attaché à la notion de "citoyenneté". La France est un pays suffisamment souple en matière de naturalisation pour que l'on ne puisse considérer que les immigrés sont laissés à l'écart de la vie démocratique. Pour mémoire d'après l'INSEE la France compte 4,9 millions d'immigrés (8% de la population) mais 2 millions d'entre eux sont des citoyens français.
En ce qui concerne l'argument selon lequel il ne serait pas just que seuls les citoyens ressortissants des autres pays de l'Union Européenne puissent voter, je trouve que justement, la situation actuelle à l'avantage de mettre en avant l'idée de citoyenneté européenne. Lors des dernières élections, j'ai présidé un bureau de vote et je trouvais cela très émouvant à chaque fois qu'un citoyen "européen" exerçait son droit de vote. Donner le droit de vote à tous les étrangers serait remettre en cause cette mise en avant de la dimension européenne de la citoyenneté.
Il s'agit de plus d'un débat qui reste sensible. On ne peut se demander, à chaque fois qu'il ressort, dans quelle mesure il ne s'agit pas pour une certaine partie de la gauche de réveiller un Front National (qui lui facilitait bien les choses avant de la faire trébucher lors des lamentables élections présidentielles de 2002) ?
Le but est peut-être aussi de diviser la droite. L'opération a dans ce but bien réussi puisque le groupe "UMP Paris" a fait montre dans cette affaire d'un manque d'unité qui augure vraiment mal de l'avenir. En effet, dès la semaine dernière, certains Conseillers du de Paris, Roxanne Decorte ou Pierre-Yves Bournazel ont annoncé qu'il soutenaient la proposition du droit de vote des étrangers en France. Par la suite, la question a été posée au Conseil de Paris du mardi 27 mai, le groupe UMP Paris n'a pas réussi à garder son unité sur ce sujet. Le président du groupe Jean-François Lamour a du consentir à la liberté de vote. 54 Conseillers de droite ont voté contre (notamment notre Conseiller de Paris du 4e Vincent Roger), d'autres se sont abstenus (par exemple Jean-François Legaret, maire du Ier arrondissement, Françoise de Panafieu, Roxane Decorte, Pierre-Yves Bournazel) au nom de l'idée qu'ils étaient pour le droit de vote des étrangers en France mais qu'ils voulaient une règle de réciprocité entre les pays. Un beau petit chahut s'en est suivi comme le raconte le journal Le Parisien du 28 mai 2008.
Il s'agit d'un sujet très important. On peut d'ailleurs s'étonner que le maire de Paris n'ait pas été présent dans l'hémicycle au moment du débat. Il est dommage que ce débat soit à l'origine parti d'une initiative contestable. Quel est l'intérêt dans le fond d'organiser cette votation citoyenne à laquelle finalement seulement 32 205 Parisiens ont participé ? Pour annoncer les résultats on peut soit annoncé que 94,95% ont voté "oui" (30 578 votes), ou que 0,02% des 1 200 000 électeurs parisiens.
Certes, on peut s'étonner pour finir que le président Sarkozy ait dit lui-même qu'il était pour à titre personnel mais que les Français n'étaient pas prêts. Le droit de vote des étrangers méritent un vrai débat qui pose des questions légitimes qui doivent être débattues. J'ai explique plus haut pourquoi je suis contre. Je ne suis pas pour autant xénophobe. Je suis même prêt à penser qu'il serait normal que tous les résidents puissent être consultés lors de referendum locaux. Nous sommes tous des contribuables et il est normal que chacun puisse donner son avis. Il serait bon aussi de veiller à ce que les citoyens étrangers non européens soit équitablement représentés dans les conseils de quartier puisque ceux-ci ont paraît-il vocation à devenir de vrais lieux de débat.
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