La Charte de 1814
Lors du Conseil d’arrondissement du 18 novembre 2008, les élus de la majorité avaient adopté la « Charte des Conseils de quartier » (Les élus d’opposition s’étaient abstenus).
Le nom du texte, la « Charte », m’a toujours fait penser à la « Grande Charte » (la « Magna Carta ») qui en 1216 a considérablement limité l’arbitraire royal en Angleterre et reconnu un embryon de libertés fondamentales. Le nom n'est pas non plus sans rappeler la Charte "octroyée" en 1814 par Louis XVIII et par laquelle le roi de France prévoyait la reconnaissance de certains droits. La « Chartes des Conseils de quartier du 4e» montrait une très grande ambition démocratique avec un préambule et pas moins de trente-six articles (mieux que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui n’en compte que dix-sept !).
Cette charte prévoyait des règles très tatillonnes. Le problème est que beaucoup d’entre elles ne servent à RIEN car elles n’ont jamais été appliquées. Voici quelques exemples :
« Article 4 : Le Bureau du Conseil de quartier est investi des fonctions suivantes […] consultation sur les projets concernant le quartier ou ayant une incidence sur son devenir dans tous les domaines ». En fait, dans
de nombreux domaines qui les concernent directement, les conseils de quartier
n’ont jamais été consultés, ni même informés (Un exemple le plus frappant est
celui de la localisation des stations autolib’ que les habitants découvrent au moment même de leur installation. Sur de nombreux aménagements -même mineurs- les conseils de quartiers ne sont jamais informés : par exemple le réaménagement du square de l’Hôtel de Ville, la décision d’installer un manège provisoire « place » du Bourg Tibourg, l’abattage et le remplacement des arbres du terre-plein Saint-Paul.
Les Conseils de quartier ont certes planché sur l'aménagement de certains espaces. Ainsi, le Conseil de quartier Saint-Merri a-t-il organisé une importante concertation relative à la place Edmond Michelet mais l'application des projets qui avait été adopté et validés par la mairue du 4e a sans cesse été reportée. Elle risque finalement d'aboutir à une mise en oeuvre a minima. Il aura fallu attendre les mois qui précèdent les élections pour que cela se réalise enfin (peut-être ?).
« Article 5. Le Bureau a la charge de représenter son Conseil de quartier auprès du Conseil d’arrondissement. A ce titre, il est investi d’un rôle de consultation auprès des habitants, commerçants et associations. » Cet article est très mal appliqué. Par exemple, pour la piétonisation du dimanche, la mairie a fait appel à une procédure secrète de consultation de certains habitants et de certains commerçants. Le Conseil de quartier Saint-Gervais a été informé des conclusions de l’enquête rendues sans jamais y être associé. Il n'a pu qu'après cela donner son avis (qui a été entendu car la première délimitation de la zone piétonnisée avait conduit à la mise en place d'un parcours labyrinthique pour les automobilites).
« Article 11. Pour les quartiers Arsenal et Saint-Gervais, le nombre de membres du Bureau est fixé à 39, dont au moins 26 au titre de leur résidence. Ceux-ci sont répartis en 2 collèges ». « – Le collège 1 est composé de 13 membres tirés au sort (2) sur les listes électorales, dont 3 ressortissants(es) de l’Union Européenne ». Lors du renouvellement du début 2013, la mairie a renoncé à faire un tirage au sort parmi les ressortissant(e) s de l’Union Européenne. Etonnante décision, justifiée par des raisons techniques mais qu’il est difficile de comprendre puisque les citoyens européens sont électeurs pour les élections municipales. On ne peut que regretter ce mépris à l’égard de l’idéal européen au moment même où la France et l’Allemagne célèbre les 50 ans du traité de l’Elysée.
« – Le collège 2 est composé de 14 membres, dont 2 ressortissants(es) extracommunautaires, tirés au sort (2) sur une liste de volontaires, après un large appel à la candidature ». La représentation des ressortissants extracommunautaires relève de la propagande en faveur du vote des étrangers extracommunautaires mais, manque de chance, aucun ne s’est porté volontaire (en tout cas lors du renouvellement de janvier 2013). Il s’agit donc ni plus ni moins que d’un article qui maquille l’absence de véritable politique pour intégrer les étrangers non communautaires à la vie de l’arrondissement. Il est vrai qu’on le comprend mieux quand on observe le mépris envers les citoyens européens.
« Pour les deux collèges, des listes de suppléants sont tenues. En cas de postes vacants dans l’un des collèges, il est fait recours aux listes de suppléants. » Cette liste de suppléant est assez obscure en ce qui concerne les volontaires. Un proche de la majorité municipale a été intégré au bureau du Conseil de quartier des îles alors qu’on se demande bien à quel titre il figurait sur cette liste des suppléants. De même, il avait été demandé que deux membres du Conseil de quartier Saint-Gervais qui avaient obtenu un logement social sur l’île Saint-Louis soient intégrées d’office dans le Conseil de quartier des îles. Lors du renouvellement de 2013, la mairie avait complètement oublié l’existence de ces suppléants en cas de départ des titulaires. J'ai demandé et obtenu qu’au moins un suppléant soit tiré au sort.
« Article 12. Le Bureau du Conseil de quartier élit son(sa) Président e) et deux Secrétaires, à la majorité absolue des membres du Bureau […] Le mandat de deux ans du Président est renouvelable une fois ». Les présidents des conseils de quartier élu début 2009 n’ont pas été soumis à une réélection en 2011. Les nouvelles élections sont prévues en mars/avril 2013. Difficile de savoir si les présidents élus en 2009 auront le droit de faire un 2e mandat. Je milite personnellement plutôt pour mais je ne fais ici que rappeler ce que prévoit la charte.
« Article 14. Au terme de la seconde année calendaire de sa mise en place, le Bureau du Conseil de quartier procèdera à son renouvellement. Au moins un tiers du Bureau doit être constitué de nouveaux membres ». Article que la mairie a oublié. Il a fallu attendre 2012 (donc avec au moins un an de retard) suite à une question que j'avais posé dans le cadre des questions du publics en Conseil d’arrondissement pour que le processus de renouvellement soit lancé. Il n’a véritablement abouti qu’en janvier 2013 donc avec plus de 2 ans de retard.
« Article 15. En cas de démission ou d’absences non excusées à plus de 4 séances, il est procédé, pour la durée du mandat restant à courir, à la désignation d’un nouveau conseiller issu des listes de suppléants. »
Article difficilement applicable en ce qui concerne les volontaires puisque le nombre de suppléants tirés au sort est très réduit (un seul lors du renouvellement en janvier 2013 et cela suite à notre demande). De plus, l’exclusion des membres absents pendant plus de quatre séances a été oubliée. Les président de Conseil de quartier des Îles et de Saint-Gervais ont fait une étude en mai 2012 pour que la mairie élime les membres absentéistes et non pas les membres qui avaient été assidus !
« Article 18. Le Maire de l’arrondissement, ou son représentant, et/ou les élus en charge de la Démocratie Participative peuvent assister aux réunions, à la demande du Bureau ou de leur propre initiative. Tout élu peut participer aux réunions publiques organisées par les Bureaux des Conseils ». Cet article lui a été particulièrement bien appliqué puisque les élus de la majorité municipale n’ont cessé d’être invités ou… de s’inviter dans les conseils de quartier. Par exemple, au conseil de quartier Arsenal, pas moins de trois adjoints (Julien Landel, Claire Guidi et Corine Faugeron) sont intervenus au cours des dernières réunions. Le directeur de cabinet a même eu le droit de s’inviter à écouter les délibérations de ce Conseil.
« Article 24. L’ordre du jour est arrêté par les membres du Bureau à chaque fin de réunion. Le (la) Président (e) peut ajouter des points à l’ordre du jour au minimum 10 jours avant la réunion. Il sera ensuite transmis aux membres du Bureau. » Un article merveilleux sur le papier mais inapplicable… Dans la plupart des cas, l’ordre du jour des conseils de quartier est décidé au début de la réunion du Conseil de quartier.
« Article 28. Le Bureau doit organiser au minimum 3 réunions publiques du Conseil de quartier par an, auxquelles tous les résidents et usagers sont conviés ». Un article fort mal appliqué puisque si les réunions du Conseil de quartier sont « ouvertes » les réunions publiques doivent donner lieu à une large information préalable comme cela est prévu par l’article 30 (« Pour l’information de la population du quartier, l’ordre du jour est affiché dans les lieux prévus à cet effet, à la mairie d’arrondissement et sur le site Internet de la Mairie, au moins huit jours avant la date de la réunion »). Ce type de réunion n’a été organisé que fort rarement. Pour le Conseil de quartier Saint-Gervais, la dernière de ce type a eu lieu à l’école de la rue de Moussy le 17 juin… 2009.
« Article 31. Le Bureau du Conseil de quartier est informé des points mis à l’ordre du jour et/ou des décisions actées par le Conseil d’arrondissement qui concernent spécifiquement sa zone d’intervention. » Cet article n’a pas été appliqué. A titre d’exemple, pour les délibérations relatives au jardin sonore de la Cité des Arts la Conseil de quartier n’a pas été informé.
« Article 36. Lors du renouvellement des Bureaux, ceux-ci établissent un bilan de fonctionnement afin d’apprécier les acquis, de consolider les résultats et éventuellement de décider des évolutions souhaitables ».
Cet article ne semble pas du tout avoir été appliqué lors du renouvellement du bureau des Conseils de quartier de janvier 2013. Pour preuve, deux des présidents des Conseils de quartier ont appris par mon intermédiaire que les ressortissants de l'Union Européenne avaient été exclus des listes pour le tirage au sort sur les listes électorales. (voir mon article du 1er février 2013).
La charte des Conseils de quartier du 4e a donc une certaine parenté avec la Constitution de l’URSS de 1936. C’est un très beau texte à lire avec une incroyable complexité… mais il sert principalement de poudre aux yeux pour pouvoir faire de la propagande à propos de la démocratie participative, un thème dont la majorité municipale du 4e a fait son leitmotiv.
Bref à propos de cette charte,Dalida (que M. Delanoë appréciait tant) aurait chanté Paroles, paroles, encore des mots, toujours des mots »…
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